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Love-room au-dessus, mises en demeure en dessous : récit d’un bras de fer locatif

Love-room au-dessus, mises en demeure en dessous : récit d’un bras de fer locatif

Introduction : Un quotidien ordinaire, une situation qui dérape

Je suis un locataire comme beaucoup d'autres. Je vis dans un logement pour lequel je m’acquitte de mon loyer, en espérant simplement un environnement paisible et un respect réciproque. Mais parfois, certaines situations dérapent : nuisances, incompréhensions, tensions qui montent. Et quand on cherche à faire valoir ses droits, on peut vite se sentir seul, face à des interlocuteurs qui ont plus de moyens ou de ressources.

Ce que je partage ici, c’est un retour d’expérience personnel, sans rancœur ni esprit de revanche. Simplement l’illustration qu’il est possible d’agir, de se faire entendre et de chercher des solutions par les voies appropriées, tout en respectant scrupuleusement le cadre légal.

Août 2021 – Une cohabitation imparfaite, mais gérée

Dès mon emménagement dans le bourg de Saint-Sylvain (entre Caen et Falaise), j’ai relevé des nuisances sonores ponctuelles en provenance d’un logement mitoyen exploité en meublé de courte durée, une love-room située juste au-dessus de mon appartement. Cependant, à chaque signalement, mes bailleurs, une SCI basée dans l’agglomération caennaise, intervenaient rapidement, ce qui permettait de contenir la situation. Durant plusieurs années, un équilibre fragile s’est installé. Rien n’était parfait, mais au moins, mes remontées étaient prises au sérieux.

Août 2024 – Le tournant : du mépris en réponse

Après plusieurs demandes d’intervention en 2024, les réponses de mes bailleurs ont changé de ton. Au lieu de chercher à résoudre les problèmes, ils ont commencé à les minimiser, à détourner les responsabilités ou à ignorer mes messages. C’est cette posture de mépris progressif qui a fait basculer la relation. J’ai alors entamé une documentation plus rigoureuse et commencé à envisager des voies officielles pour faire valoir mes droits (le fameux truc que j'ai gagné à l'insu de mes bailleurs).

6 août 2024 – Courrier recommandé listant les problèmes

Je transmets un courrier recommandé à mes bailleurs, listant plusieurs problèmes persistants dans le logement (fuite, absence de délimitations du parking, promesse d’installation de caméra abandonnée) et exprimant ma volonté d’avoir des éléments concrets de résolution. Je propose un dialogue. La réponse, reçue le 26 août, est sèche comme le vent du Nord (ou comme un coup de parapluie), évasive, et met fin à tout espoir de communication constructive.

8 janvier 2025 – Le mail qui marque un point de rupture

Suite à une relance de mes bailleurs concernant l’entretien des parties communes (masqué par un message de meilleurs voeux pour faire digérer la pilule), je décide de répondre longuement et précisément. Dans ce message, je rappelle que je ne me suis jamais engagé à effectuer certaines tâches (même le bail n'a pas voulu de ça !), que les engagements initiaux sont à sens unique, et que les promesses non tenues – comme celle de la vidéosurveillance – ont sapé la confiance. J’y évoque aussi les nuisances sonores persistantes (je vous laisse doucement imaginer les nuisances que peuvent générer une love-room 🔞) du loft à l’étage, les débordements du jacuzzi, les inondations subies, et je préviens que ma patience a des limites : à l’avenir, toute gêne sera systématiquement signalée. Ce mail est un tournant, car il met fin à ma tolérance silencieuse et pose clairement mes lignes rouges.

6 février 2025 – Tentative d’imposition d’un service de ménage injustifié

Par un message collectif, directement lié à ma mise au point du 6 janvier à laquelle ils n'ont jamais osé daigné répondre, mes bailleurs annoncent leur volonté (par un moyen qu'on pourrait considérer comme étant du chantage sans connotation légale) de mettre en place une prestation de ménage professionnelle pour les parties communes, sans concertation ni avenant au bail. Ce service, présenté comme obligatoire, inclut également l’entretien du linge et le repassage – prestations manifestement destinées aux logements touristiques qu’ils exploitent en parallèle. Bien évidemment, cela a été présenté avec un devis périmé, puisque la démarche est très sérieuse. La menace d’une augmentation des charges pour les résidents classiques est brandie si nous refusons de signer un planning ou de prendre en charge les coûts. Je refuse cette tentative d’imposition injustifiée et dénonce le caractère potentiellement frauduleux de cette manœuvre, visant à faire supporter à des locataires traditionnels les frais liés à une activité commerciale distincte.

13 février 2025 – Envoi d’une mise en demeure à mes bailleurs

Constatant que la situation stagne et que mon refus est encore ignoré (alors qu'ils répondent sous 1 heure sur Airbnb, comme quoi y a des priorités), j’adresse une mise en demeure en bonne et due forme, rappelant leurs obligations (afin qu'ils comprennent qu'ils gèrent une société immobilière, pas un centre de vacances), les articles de loi concernés, les faits constatés et les conséquences éventuelles en cas de refus d’agir. Je fixe un délai raisonnable (14 jours francs) pour obtenir une réponse et des actions.

18 février 2025 – Réaction : tentative de résiliation de bail

Quelques jours après ma mise en demeure, je reçois un courrier de mes bailleurs annonçant leur volonté de reprendre le logement pour l’habiter eux-mêmes (tiens donc !). Le motif est déclaré comme "légitime et sérieux". Je soupçonne immédiatement une tentative de rétorsion, camouflée sous une démarche en apparence conforme. D'autant plus qu'ils disposent du logement au-dessus du mien, loué en Airbnb, pour y loger.

Fin février 2025 – Je contre-attaque par courrier juridique

Je réponds en contestant la validité du congé, pointant les incohérences, l’absence de justification concrète, et la proximité troublante entre leur réaction et ma mise en demeure. Je dénonce une manœuvre d'intérêt économique qui pourrait être perçue comme abusive. Je préviens que j’envisage des actions devant les autorités compétentes.

Mars 2025 – Intervention d’un avocat et escalade

Divers signalements au support Airbnb ainsi qu’à la DGCCRF visant l’entité Airbnb. Airbnb me fait des retours indiquant qu’ils ne sont pas responsables des agissements de leurs hôtes.

L'avocat de mes bailleurs me fait parvenir une mise en demeure musclée (imaginez Rambo avec un costume 3 pièces 😉) affirmant que je ferais pression sur ces derniers, que mes démarches seraient injustifiées, et que mes propos relèveraient de l’abus. Le courrier, bien que solennel, me semble très imprécis juridiquement. Je prends le temps de l’analyser et de vérifier chaque allégation.

Ayant déjà anticipé l'intervention de l'avocat – mes bailleurs sont irrémédiablement prévisibles – je prépare une réponse structurée et posée, puis l’adresse par mail en 30 minutes – plus rapide qu'un cycle de lavage en machine, parce qu'il n'y avait pas grand chose à démonter (le courrier était quasiment vide, même de sens) et qu'il faut pas déconner non plus – après avoir reçu l'anticipation mail de sa mise en demeure.

Avril 2025 – Classement du signalement par le Bâtonnier, rencontre avec le maire, et vigilance renforcée

Je réponds posément, en rappelant les faits, les dates, les documents transmis et en remettant en demeure l'avocat de me fournir sous 7 jours calendaires une attestation sur l'honneur, rédigée par lui-même, actant l'indisponibilité d'un autre logement pour ses clients. Cette attestation ne me parviendra jamais, puisque l’avocat, probablement pas neutre, veut se mouiller mais pas trop. J’adresse donc le 7 avril 2025 une contestation formelle et argumentée au Bâtonnier de l’Ordre des Avocats du Barreau de Caen, et j’informe la DGCCRF des événements en postant un signalement contre le cabinet d'avocats pour le chef d'intimidation sur particulier exerçant ses droits. En parallèle, je continue d’informer la mairie, qui suit désormais le dossier.

Le 5 avril 2025, je rencontre personnellement le maire de ma commune, qui m'informe qu’il existe déjà d’autres contentieux en cours entre la municipalité, le conseil départemental et mes bailleurs. Ce soutien institutionnel renforce la légitimité de mes démarches et m’encourage à poursuivre de façon rigoureuse.

Interrogés par mail les 10 et 20 avril sur certaines incohérences dans leur congé et dans le but de les clarifier, mes bailleurs ont préféré, une fois de plus et conformément à leur stratégie de fuite, jouer au roi du silence.

Le 14 avril, petite surprise : le Bâtonnier, après avoir pris 2 minutes (maximum) pour étudier la forme de la mise en demeure de son confrère, estime qu’elle ne contient aucune erreur déontologique. Pire encore, il estime que je l’ai méritée. Il semblerait qu’il protège son confrère et n’ait pas analysé le fond du dossier, rendant son analyse pas forcément utile.

Le 16 avril, une réponse maladroite voire méprisante de l'avocat à un signalement DGCCRF le concernant semble être une faille sérieuse (la DGCCRF n'est pas réputée pour laisser passer ça) du côté de mes bailleurs. L’avocat a joué les fanfarons avec une arrogance qui dépasse l’entendement (je m’en demande presque comment son ego peut franchir les portes). Je me permets d'ailleurs de leur transférer cette réponse (par empathie, par gentillesse, par fair-play, par... tout ce que vous voulez) qui pourrait les décrédibiliser eux-mêmes devant l'autorité administrative.

Le 17 avril, Airbnb répond au signalement DGCCRF du 26 mars directement via la plate-forme, indiquant que le dossier a été remonté au service concerné avec le message suivant : « Nos services vont étudier votre dossier et revenir vers vous dans les meilleurs délais. Nous vous remercions pour votre patience. »

Le suivi de ce dossier reste donc pleinement d’actualité chez Airbnb, peut-être suite relance de la DGCCRF.

Concernant l’avocat, malgré nouveau signalement DGCCRF émis cette même date en réponse à son mépris, celui-ci refuse, le 25 avril, de modifier ou de nuancer ses précédentes affirmations, estimant n'avoir rien à rajouter, ni à retrancher, témoignant ainsi d'une certaine persistance dans sa suffisance professionnelle.

Le 24 avril, je relance l'avocat, avec son client en copie, en lui demandant comment il a pu mentionner dans sa mise en demeure des "prétendues et inexistantes irrégularités" de la part de ses clients alors que leurs deux logements Airbnb ne sont pas déclarés en mairie et, qui plus est, continuent à recevoir du public. Il semble que l'avocat a préféré ne pas répondre à cette sollicitation.

À ce stade, l’ampleur des irrégularités relevées par les différentes autorités, conjuguée à l’absence de remise en cause des bailleurs et de leur conseil — dont l’implication semble dépasser le seul cadre d’une stricte défense juridique — dessine pour ces derniers une perspective administrative particulièrement complexe.

Les bailleurs, eux, ne me sollicitent plus. Le calme revient, mais je reste en veille. Chaque bruit suspect est mesuré, chaque écart est documenté. Je maintiens le cap : calme, précision, et recours aux voies officielles.

Résumé des faits

  • Une SCI qui fait fonctionner deux logements Airbnb de type love-room à environ 200 € la nuit, toute l'année. Preuves : les annonces Airbnb et Booking des logements.
  • Un des logements, situés juste au-dessus de mon appartement, génère de fortes nuisances sonores. Preuve : relevé sonore de 60 dB effectué dans les parties communes de l'immeuble le 22 mars à 1h du matin.
  • Les bailleurs sont au courant des gênes sonores depuis que je suis arrivé dans le logement, c'est à dire août 2021, mais le problème n'a jamais été résolu depuis.
  • Ces deux logements Airbnb ne sont pas déclarés en mairie, cela m'a été formellement confirmé par le maire, le samedi 5 avril 2025.
  • Les bailleurs divorcent trois semaines après avoir écrit, dans un mail daté du 26 août 2024 : “si la situation actuelle ne vous convient plus, nous allons pouvoir mettre fin au bail.”
  • Cinq mois plus tard, le 18 février 2025, ils invoquent ce même divorce pour justifier un congé pour reprise. C’est une chronologie qui peut susciter des interrogations légitimes sur l’intention initiale. Surtout quand ce congé pour reprise est rédigé le jour de la réception par les bailleurs d’une mise en demeure à leur encontre.
  • Un locataire, officiellement soutenu par la municipalité de sa commune, qui représente un risque pour l'activité de ses bailleurs lorsqu'il fait valoir ses droits.
  • Ils sollicitent donc manifestement un avocat et lui disent qu'ils sont la cible d'un locataire qui refuse de quitter un logement malgré envoi d'une notification de résiliation de bail et qui signale de faux problèmes auprès d'Airbnb.
  • Plusieurs voisins, également exposés aux nuisances, préfèrent se taire par peur de représailles, ce qui permet aux bailleurs de maintenir leur activité sans opposition locale.
  • Le locataire utilise exclusivement les voies de droit et les démarches officielles, documentées et transparentes, pour faire valoir ses droits.

Conclusion : Se faire respecter, sereinement

Ce que j’ai appris au fil de cette expérience, c’est qu’il n’est pas nécessaire d’être juriste ou d’avoir un réseau d’appui pour faire valoir ses droits (même face à un Rambo du droit qui skie en hors-piste). Il suffit d’être rigoureux, patient, et stratégique.

La peur, souvent, vient de l’isolement. Mais il existe des institutions, des textes, des outils à notre disposition. Il ne s’agit pas de se battre, mais de se positionner. Et dans bien des cas, cela suffit à rééquilibrer la relation.

Je n’ai pas cherché à gagner un conflit. J’ai simplement refusé d’en subir un. Et c’est à la portée de tous, pour peu qu’on prenne le temps de s’informer et de s’organiser.

Car au final, défendre ses droits, c’est d’abord se rappeler qu’on en a.

Note au lecteur

Cet article ne contient aucun nom, aucune donnée personnelle, et n’a pour but que de relater une situation factuelle vécue par un locataire face à des pratiques qu’il estime contestables.

Si des personnes s’y reconnaissent et souhaitent exercer un droit de réponse, elles pourront le faire par écrit, en s’identifiant clairement, ce qui constituera par là même un aveu d’implication dans les faits exposés.